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CARTE POSTALE DU FUTUR - ENS Sources & cascades tuffeuses de Saint-Marc-sur-Seine - EPAGE SEQUANA

Nous sommes en 2050. Dis nous Claude, quel est le climat qui règne sur ton site?

Bonjour ! Alors, oui, le climat a bien changé… Les hivers sont beaucoup plus doux qu’avant, avec des températures basses négatives plus occasionnelles, et du coup, certaines espèces comme les moustiques sont devenues plus présentes. Cela dit, on a appris à gérer, à mieux connaître leurs cycles et à s’adapter.

Les précipitations ? Elles viennent par à-coups. On alterne entre périodes sèches et périodes humides bien marquées, et ça le niveau d’eau du site fluctue selon ces épisodes. Et on sait surtout maintenant que la fréquentation du site va suivre ces cycles, alors on s’organise.

L’ensoleillement est plus intense, c’est vrai mais on en tire aussi parti : on a équipé les maisons de panneaux et on a gagné en autonomie. Le vent a aussi augmenté en intensité et en fréquence. Les événements extrêmes ne sont pas forcément plus fréquents mais plus intenses, c’est certain. Du coup, les risques d’incendie, bien identifiés aujourd’hui, sont mieux gérés grâce à un vrai travail de prévention et d’anticipation. 

On essaye de vivre avec le climat, plutôt que de le subir.

 

Quel est le patrimoine naturel présent ? Quelles espèces/habitats ont disparu ? Et quelles nouvelles espèces/habitats sont arrivées ?

On a malheureusement vu partir certaines espèces emblématiques… Cordulégastre, salamandre, bouvreuil… Mais d’autres, plus adaptées aux nouvelles conditions, ont trouvé ici un nouvel équilibre. Certaines espèces méditerranéennes ou locales peu sensibles sont bien installées aujourd’hui, et enrichissent le patrimoine naturel différemment.

Côté forêt, les anciens grands arbres n’ont pas tous résisté à la sécheresse, ils sont là mais ils sont plus chétifs. Mais ça a ouvert la voie à des dynamiques nouvelles. Le robinier, l’érable champêtre, d’autres feuillus résilients se développent bien. On travaille à garder un équilibre entre essences indigènes et naturalisées. Et on est beaucoup plus soigneux par rapport à la gestion des arbres. On sait qu’ils sont indispensables au site durant l’été car ils permettent d’éviter des écarts de températures trop costauds. Donc, on entretient et on replante de façon très pointilleuse. 

Les vasques de tuff, qui ont souffert des épisodes secs, continuent à surprendre. On pensait qu’elles allaient disparaître mais elles continuent de fonctionner, avec des écoulements malheureusement parfois interrompus. Elles sont cependant bien fragilisées. Certaines années, elles reprennent vie plus tôt que prévu selon les précipitations. Et les mousses adaptées aux alternances humides-sèches sont là, fidèles au poste. 

Finalement, le site a évolué, mais il reste vivant, riche, surprenant dans sa résilience.

 

Quelles sont les activités humaines qui se déroulent dans et autour de l’aire protégée ? Quelles pressions exercent-elles sur le patrimoine naturel ?

L’humain a dû s’adapter. Des stations de pompage d’eau ont été installées pour l’alimentation en eau potable et l’irrigation. On est cependant beaucoup plus sensible à la rareté de l’eau que par le passé. On sait qu’on peut faire face à des périodes de sécheresse et on s’organise pour être responsables, avec des quotas et du suivi. La collecte des eaux pluviales s’est généralisée dans le village, ce qui limite la pression en période sèche.

L’agriculture a fait un virage majeur. Après une phase compliquée dans les premières années de crise, on a changé notre manière de consommer… On n’avait pas trop le choix en fait. Pas mal de jeunes sont revenus dans le coin, car ils étouffent en ville et ils voulaient reprendre leur indépendance. Du coup, des projets collectifs ont émergé, avec des pratiques agroécologiques, parfois même en lien direct avec le site…

En été, le site reste un refuge apprécié pour sa fraîcheur. On a dû réguler la surfréquentation, et on ferme parfois le site avec une surveillance à certaines périodes. Mais comme on a mis d’autres sites en place en parallèle, il n’y a pas forcément de visiteurs intempestifs. Ceux qui veulent du frais ont des lieux plus adéquats où s’installer. 

 

Et vous, en tant que gestionnaire, que faites-vous (quelle gestion ?) sur votre site ? Et que voulez-vous pour votre site ?

Comme je vous le disais, on a pris acte des changements, et on a choisi d’agir. On accompagne les nouvelles dynamiques écologiques, tout en gardant la mémoire du passé. On a fait le deuil de certaines espèces, mais on a appris à valoriser les nouvelles venues.

Côté fréquentation, on a pris des mesures fortes : l’accès au site est réservé aux habitants de Saint-Marc, avec qui on travaille main dans la main. Et pour ne pas déplacer le problème, on a co-construit avec les communes voisines des espaces de fraîcheur alternatifs – des piscines naturelles par exemple. On savait que les gens veulent se baigner quand il fait chaud et on ne pouvait/voulait pas les empêcher. Donc, on a pris le problème à l’envers. Comment protéger le site et permettre aux habitants de se rafraichir ? Les espaces de baignade naturelle qu’on a créés sont des zones encadrées par des surveillants formés à la préservation du milieu : ils sensibilisent à l’usage des crèmes solaires, limitent le temps de baignade et orientent les visiteurs vers les zones les moins sensibles. On essaye de créer un équilibre d’adaptation qui n’est pas parfait mais a le mérite de proposer des solutions. 

On mise beaucoup sur l’éducation et la sensibilisation. Sur le site, les visiteurs découvrent non seulement une nature différente, mais aussi l’histoire d’un site qui a su s’adapter, évoluer, rebondir. La mémoire du lieu est précieuse, et on y tient.

Enfin, on prend très au sérieux le risque incendie. La gestion a été adaptée avec des troupeaux qui pâturent.

 

De quels partenaires est composée la gouvernance ? Et quelle portée/rayonnement a le site sur le territoire ?

La gouvernance s’est renforcée. On travaille toujours avec la mairie, le CENB, la LPO, la Fédération de pêche… Et la chambre d’agriculture est aussi un partenaire clé dans l’accompagnement des agris à la gestion de l’eau.

Mais ce qui a tout changé, c’est la reconnaissance juridique des cascades du Crodin. Ça leur a donné un vrai statut, et donc un vrai poids dans les décisions. Elles sont aujourd’hui protégées, respectées, intégrées dans toutes les stratégies locales autour de l’eau.

Le site rayonne à nouveau, pas comme un lieu figé dans le passé, mais comme un espace d’innovation écologique, de résilience, de coopération. C’est un symbole d’adaptation réussie, et ça attire chercheurs, naturalistes, citoyens curieux.



 

 

Adaptation des ENS de Côte-d'Or au changement climatique
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